Édition du mercredi 10 mars 2004
Fraternité, cause nationale : maires de France, de grandes villes, de villes moyennes et de petites villes se mobilisent
«La fraternité n'est pas qu'un joli mot suranné. Ni une façon d'enterrer les dispositifs sociaux. Elle est tout simplement essentielle si nous ne voulons pas foncer dans le mur», a lancé hier Jean-Louis Sanchez, délégué général de l'Observatoire de l'action sociale décentralisée (Odas), pour présenter la grande cause nationale récemment désignée par le Premier ministre. «La solidarité institutionnelle a touché ses limites», a-t-il assuré, alignant chiffres et études. Les suicides augmentent, tout comme la maltraitance des enfants, notamment dans les familles isolées.
Le nombre de personnes âgées seules s'accroît tandis que les aidants diminuent. «Seule la fraternité peut éviter le délitement de la société», a-t-il encore défendu.
Pour transformer ces bonnes intentions en réalisations concrètes, l'association qui pilote la grande cause a largement associé institutions, organisations caritatives et maires. L'Association des maires de France, celle des grandes villes de France, la Fédération des villes moyennes et celle des petites villes se sont mobilisées.
Une cinquantaine de maires, dont Bertrand Delanoë (Paris, PS), Jean-Claude Gaudin (Marseille, UMP), Jean-Marie Bockel (Mulhouse, PS) ou Patrick Braouzec (Saint-Denis, PC), veulent créer un service de volontariat «pour mettre en adéquation les bonnes volontés et les besoins», a détaillé Bruno Bourg-Broc, député maire UMP de Châlons-en-Champagne (Marne) tandis que Jean-Claude Frécon, vice-président de l'AMF, a souligné que cette question de la fraternité concerne tout autant le milieu rural que le milieu urbain.
Car les Français souhaitent s'engager plus largement : 84% seraient prêts à faire des efforts «pour améliorer la fraternité entre les individus», selon un sondage Ifop réalisé les 4 et 5 mars auprès d'un échantillon de 1 007 personnes.Un engouement à la mesure de leur pessimisme : 72% sont persuadés que les rapports humains vont se dégrader à l'avenir.
Beaucoup d'initiatives existent déjà, mais restent éparses. Les responsables de l'Année de la fraternité espèrent généraliser les bonnes pratiques, comme celle adoptée par la ville du Havre où, depuis 2000, une association montée par la mairie UMP oriente les bénévoles. «Sinon, ils feraient tous du soutien scolaire», explique Brigitte Dufour, adjointe au maire responsable de l'aide sociale. «Nous répartissons les volontaires mais, surtout, nous les soutenons. Sans suivi, beaucoup abandonnent devant la lourdeur des situations rencontrées.»
Parmi les bénévoles, les jeunes retraités sont souvent affectés à l'aide aux personnes âgées dépendantes. Certains sont alors heurtés par les manifestations d'une vieillesse qu'ils redoutent. Une école des bénévoles a donc été créée pour permettre des échanges, du soutien psychologique, de la formation sur le plan juridique.
Car les maires le reconnaissent : les volontaires, sans remplacer les travailleurs sociaux, deviennent de véritables référents pour ceux qu'ils aident, comme le maître ou le curé autrefois. La relation de confiance s'avère presque aussi importante que l'aide concrètement reçue.<
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